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Une Tonne !

Toujours en faire des tonnes...

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The Blade

--> Film Hong-kongais de Tsui Hark, 1995.




Il est comme ca, Tsui Hark.
De temps en temps lui prend l'envie de révolutionner un genre ultra-établi, ou du moins de lui offrir une oeuvre définitive, somme de tout ce qu'on peut y tenter, somme parodique de tout ce qu'on y a vu par le passé, et somme de toutes les idées nouvelles que Tsui Hark peut y injecter, le tout amoureusement malaxé et défracté par sa manière de filmer, conjuguée à l'impératif double de mobilité et d'entropie.

De retour des USA, il balaie d'un revers de la main toute l'histoire du film d'action/gangsters "à la HK" avec l'inénarrable TIME AND TIDE, somme de trouvailles hallucinantes de virtuosité visuelle et de piques parodiques envoyées à ses collègues d'alors...

Quelques années plus tôt, il fait la même chose avec The Blade. Le scénario est archi-classique : deux hommes se battent pour les faveurs d'une donzelle, qui sans le savoir ouvre la boîte de Pandore en révélant à l'un d'eux, orphelin, que son vrai père a été tué par le vilain de service alors qu'il était encore dans ses couches. L'impétueux jeune homme fuit la fonderie d'épées dirigée par l'homme qui l'a recueilli, emportant avec lui le fragment de la lame de son défunt père...au cours des péripéties qui s'ensuivent, sa main est coupée, et le voilà peu à peu transmuté en sabreur-manchot (figure récurrente du genre) ivre de vengeance...

L'intérêt comme dans TIME AND TIDE réside plus dans le traitement par Tsui Hark d'une telle trame, bien vite malmenée et distordue dans tous les sens, dans le traitement parodique du genre et bien entendu dans le traitement visuel de la chose....

Le traitement parodique est évident lorsqu'on voit le héros s'entrainer attaché à un fil (les câbles habituels de nos super-sabreurs volants) qu'il coupera ensuite, son compère "sauver" une jeune femme avec des intentions pas forcément bien nobles à son égard, un gamin s'amuser à faire des grimaces alors que notre manchot enterre solennellement la lame de son père, la potiche de service enquiller de grandes phrases en voix off (cf Les Cendres du Temps, autre tentative de destruction/évolution du genre par Wong Kar Wai cette fois) après avoir brisé pour le plaisir du marivaudage le bel ordre qui régnait au début de l'intrigue pour finalement vieillir seule (mais moins bête, c'est déjà ca), etc, etc...

Le traitement de l'action enfin: si Tsui Hark se permet parfois quelques "tableaux de maître" aux belles couleurs brûlées ou pastels (notamment le travail sur le visage des "pirates du désert"), ils sont juste esquissés et encore plus vite escamotés, car la plupart du temps il est bien trop occupé à détruire les codes visuels de mouvements amples et de caméras lointaines et à peu près fixes sur des combattants qui volent majestueusement l'épée au clair, pour leur préférer des mouvements chaotiques, hystériques parfois, qui font ressentir l'action non pas comme un tableau à apprécier avec les yeux et la tête, mais à vivre dans ses tripes dans des soubresauts jubilatoires.

Par dessus tout, lui et ses héros ne nient pas la gravité: il s'en servent, la maîtrisent, la plient à leur volonté mais sans JAMAIS l'oblitérer, tout au contraire des films de sabre traditionnels, qui s'affranchissent sans complexe de tout repère physique pour nous livrer une fable onirique, The Blade montre des guerriers qui se frottent au réel, s'y cognent, s'y blessent pour finalement le dompter.

Bien entendu, la minceur du scénario et les tics habituels de naïveté un brin agaçante qui accompagnent un grand nombre de productions HK lorsqu'il s'agit d'exprimer des sentiments ou tout ce qui relève d'une psychologie un peu fine -qui font après tout partie des limites du genre (que seul Wong Kar Wai a réussi - certes dans la douleur - à transcender)- prêteront parfois à sourire, mais le tour de force visuel et référentiel rend The Blade incontournable pour tout amateur d'émotions fortes, à défaut d'émotion tout court...

La fiche du film sur Cinémasie

Ecrit par antonz, le Mercredi 23 Février 2005, 17:06 dans la rubrique "archives".

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